Choisir entre SCI à l’IR ou à l’IS
Petite précision avant de commencer : on désigne par SCI à l’IR une Société Civile Immobilière à l’impôt sur le revenu, tandis que IS désigne l’impôt sur les sociétés. Une Société Civile Immobilière est par principe à l’impôt sur le revenu. Mais si on parle de SCI à l’impôt sur le revenu, on devrait, juridiquement parlant, aborder le terme de transparence fiscale, car ce sont les associés qui sont concernés par l’impôt. À l’inverse, l’option de la SCI à l’impôt sur les sociétés (IS) rend la SCI fiscalement autonome (aussi qualifiée de société opaque). Dans ces conditions, les associés ne sont plus imposables sur les résultats de la SCI.
Mais finalement, faut il choisir une SCI à l’IR ou plutôt à l’IS ? Quelles sont les conséquences fiscales dont il faut se méfier lorsque l’on passe de l’IR à l’IS ? Existe-t-il une bonne période pour l’option à l’IS ? Cet article vous démontre les intérêts à travers des exemples chiffrés.
Résumons la situation
En premier lieu, la plupart des particuliers achètent des biens fonciers en direct sans passer par la case Société Civile Immobilière. Quelle en est la raison ? Complexité, coût de mise en oeuvre, manque de conseil ? Peu importe. La question de cet article n’est pas de traiter de l’intérêt d’une SCI pour la transmission, ni pour la fiscalité des associés, ni pour la facilité d’augmenter son patrimoine, ni même pour le partage d’un bien, mais afin de faire la différence entre ces deux impôts totalement différents. L’impôt sur le revenu (IR) d’un côté, et l’impôt sur les sociétés (IS) de l’autre.
Les nombreux avantages de la société civile immobilière imposée au revenu
Après ce préambule, il est à noter que la SCI à l’impôt sur le revenu est la forme fiscale la plus utilisée par les particuliers. Cette forme juridique a tut de même le mérite d’être souvent compatible avec les différentes lois sur l’immobilier, portant les noms des différents ministres du logement de ces 40 dernières années.
La SCI à l’impôt sur le revenu offre surtout l’avantage de ne pas déstabiliser les associés grâce à sa transparence fiscale. De fait, cela les oblige juste à réaliser quelques étapes supplémentaires par rapport à l’acquisition d’un bien en direct :
- Tout d’abord, création d’une SCI avec rédaction des statuts, envoi au greffe du tribunal de commerce et publication au journal d’annonces légales,
- Ensuite et tous les ans, réalisation d’une liasse fiscale n°2072 pour porter ces chiffres dans une déclaration n°2044 et n°2042 (votre déclaration habituelle),
- Enfin, réalisation d’une assemblée générale ordinaire d’approbation des comptes chaque année,
- Pour information, la comptabilité n’est pas nécessairement obligatoire, mais tout de même très fortement recommandée.
Finalement, rien de méchant à faire. Mais la création d’une SCI décourage tout de même environ 90% des français qui ne se donnent pas la peine de réfléchir aux bénéfices qu’elle peut leur procurer.
Caractéristiques des SCI à l’impôt sur le revenu et IS
SCI à l’IR : Moins favorable les 30 premières années
Pour commencer, le problème de la SCI est généralement lié à son manque de déductibilité au cours de la vie de la société. Certes, vous pouvez passer certaines dépenses, mais dès qu’elles dépassent un certain montant par rapport au prix d’acquisition ou que vous augmentiez la superficie, plus aucune dépense ne devient quasiment déductible. Ainsi, vous vous trouvez imposable à cause d’un résultat foncier alors même que les loyers ne couvrent pas la totalité du remboursement des échéances d’emprunt. La preuve par les chiffres ?
Exemple : les revenus fonciers
On suppose l’acquisition d’un studio à Lyon pour une somme de 150 000 euros. La fiscalité pourrait être la suivante la première année :
Montant du loyer |
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Total des produits |
Charges de copropriété |
Frais financiers liées aux emprunts |
Assurances |
Réparations plombiers |
Forfait un local |
Total des charges |
Revenus fonciers (produits – charges) |
On suppose un taux d'IR à 20% et une CSG à 17,2% |
Comparons SCI à l’IR et à l’IS
Exemple : les BIC
On suppose cette fois ci que les associés de la SCI ont opté à l’impôt sur les sociétés. Les hypothèses sont les mêmes. Ainsi, la fiscalité de la SCI la première année serait la suivante.
Montant du loyer |
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Total des produits |
Charges de copropriété |
Frais financiers liées aux emprunts |
Assurances |
Réparations plombiers |
Amortissement du studio sur une durée de 30 ans à hauteur de 85% |
Frais de notaires |
Total des charges |
Perte fiscale (produits – charges) |
Ainsi, la première année représente un déficit fiscal de 9 950 euros qui sera reporté les années suivantes. Dans cet exemple, la SCI à l’IS commencera à payer de l’impôt la 12ème année suivant l’acquisition du bien. Mieux, à chiffres identiques, la SCI paiera 140 € d’impôt à l’année, d’autre part, les associés n’ont rien à payer comme impôt.
SCI à l’IS : Moins favorable lors des cessions
Lors de la vie d’une SCI, les associés peuvent avoir envie de céder le bien immobilier. Reprenons l’exemple de la SCI vue ci dessus où le bien est vendu 31 ans après son acquisition.
Prix de vente |
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Prix d'acquisition |
Montant de l'amortissement pratiqué |
Valeur nette comptable du bien |
Montant de la plus value |
Montant de l'impôt |
Montant disponible dans la société |
Impôt à payer pour transférer l'argent de la SCI vers le patrimoine des associés |
Argent perçu par les associés suite à la liquidation de la SCI |
Faut il passer à l’impôt sur les sociétés ?
Dans l’exemple décrit ci dessus, les associés de la SCI restant à l’IR se sont acquittés de 57 780 euros d’impôt sur le revenu et de CSG. Mais lors de la cession, ils économisent 116 121 euros.
Cependant, ces chiffres doivent être pris avec beaucoup de recul. En effet, en 30 ans, il faut tenir compte de l’inflation, de l’augmentation des loyers, des variations de l’impôt des associés, de la plus value et pire de l’évolution des lois. Qui peut prédire aujourd’hui l’exonération de la plus value après 30 années de détention des biens ? Une loi prochaine pourrait tout changer.
Pourquoi passer d’une SCI imposée au revenu à l’impôt sur les sociétés ?
Tout d’abord, l’envie de passer à l’IS peut naître de l’impôt sur le revenu et de la CSG à payer tous les ans. Le montant en sera d’autant plus élevé que votre niveau de tranche marginale est élevée. De surcroît, cette situation ne peut que s’aggraver du fait de l’élévation généralement constatée de ses revenus et du départ des enfants du foyer fiscal au cours des 30 années qui suivent l’acquisition.
Ensuite, toutes les personnes n’ont pas nécessairement envie de céder leurs biens immobiliers. Parfois, ils ont juste envie de compléter leurs revenus lors de leur retraite et de préparer leur transmission.
Mais aussi, quid des personnes qui partent à la retraite dans d’autres pays à fiscalité plus avantageuse comme le Portugal qui promet l’exonération d’imposition pour les français pendant 10 ans ?
Enfin, que penser des possibilités de repasser d’une SCI à l’IS à une SCI à l’IR comme cela se pratiquait 30 ans avant ? En matière de fiscalité, personne ne peut parier sur un maintien ou un changement.
La date d’option IS
Le gérant, après avoir consulté les associés de la SCI, peut faire opter la SCI au régime de l’impôt sur les sociétés dans les 3 mois qui suivent l’ouverture d’un exercice. Dans cet esprit, les associés souhaitant faire passer la SCI à l’IS en 2020 auraient jusqu’au 31 mars 2020 pour le faire.
S’agissant du modèle de lettre d’option à l’IS, pensez à la faire signer à chaque associé et l’envoyer par lettre recommandée. Mais attention à l’impossibilité de revenir sur votre choix ensuite.
Pourquoi rester en SCI à l’Impôt sur le revenu ?
Durée de détention des parts
Si vous disposez d’une SCI depuis 30 ans, alors rien ne sert de passer à l’IS à priori. En effet, le passage à l’IS nécessite de faire un bilan d’ouverture en comptabilité. Ainsi, vous devez enregistrer en comptabilité les immobilisations d’origine en coût historique mais également les amortissements qui auraient du être pratiqués. Autant dire que le principal avantage de la SCI à l’IS est fortement réduit. Pire, vous pourriez même vous trouver dans l’impossibilité d’amortir.
CRL – contribution sur les revenus locatifs
Parmi les aspects négatifs de l’option IS, on retrouve le paiement de la CRL « Contribution sur les Revenus Locatifs » au taux de 2.50% du montant des loyers bruts encaissés par la SCI à l’IS. Pour cette raison, une réflexion sur l’application de la TVA doit être menée.
Régime réel ou micro foncier
Être en revenus fonciers signifie pour les associés de choisir entre le régime du réel normal et le micro foncier. Ce dernier régime peut être alors intéressant pour ceux dont les revenus sont inférieurs à 15 000 euros et qui n’ont aucune dépense sur le bien immobilier. En effet, le micro foncier permet de bénéficier d’un abattement de 30% sur les revenus fonciers. Le choix se porte sur le micro foncier lorsque les charges réelles sont inférieures à l’abattement de 30% des revenus locatifs. À l’inverse, une option au réel est préférable.
Report déficitaire non utilisé
Si vous avez effectué des travaux donnant lieu dans vos revenus fonciers à un déficit, alors il se peut que vous ne l’ayez pas utilisé sur votre revenu global de l’année. Dans cette hypothèse, ce déficit foncier est imputable sur les autres revenus fonciers où il est reportable sur le revenu global des 6 années suivantes.
Sortie d’argent de la SCI
Si le montant des loyers excède les échéances d’emprunt, alors votre SCI augmente sa trésorerie. Ainsi, il peut être tentant de sortir de l’argent de la SCI pour le rapatrier dans votre patrimoine privé.
Or, même s’il est facile de sortir de l’argent d’une SCI à l’IR en faisant simplement un virement, c’est en revanche plutôt complexe dans une SCI à l’IS. En effet, il faut procéder à une distribution de dividendes.
Cession envisagée de la SCI
Comme l’illustre le début de cet article, la SCI à l’IS est moins avantageuse qu’une SCI à l’IR lors de la cession du bien immobilier. Autant dire que si vous envisagez une cession dans un avenir proche, il est peut être prudent de renoncer au passage à l’impôt sur les sociétés. Ainsi, vous resterez sur le régime des plus-values immobilières.
Les erreurs à ne pas commettre dans une SCI à l’IS
Assemblée générale : pensez à les faire
Les statuts de SCI prévoient systématiquement l’approbation des comptes par la réunion des associés lors d’une assemblée générale au moins une fois par an. C’est obligatoire. Ainsi, n’oubliez pas de la faire car vous pourriez être taxé de fictivité au niveau de la SCI. D’un point de vue fiscal, on pourrait comparer cette situation à une bombe nucléaire. Idem pour les SCI à l’impôt sur les revenus.
S’agissant de la publication des comptes auprès du greffe du tribunal de commerce, celle ci n’est pas obligatoire pour les SCI à l’impôt sur le revenu mais le devient avec la SCI soumise à l’IS.
Comptabilité de cette forme d’imposition
Les associés doivent organiser une tenue de comptabilité de leur Société civile immobilière à l’IS. Ce socle permet notamment l’établissement d’un bilan, d’un compte de résultat, éventuellement d’une annexe et de la déclaration fiscale 2065.
Capital social pour une SCI ? Prévoir 100 euros
Avant que la fiscalité ne change, les créateurs de SCI faisaient la création d’une SCI avec un capital très important. Aujourd’hui en revanche, ce montage n’est plus nécessairement conseillé si on souhaite passer à l’IS. En effet, le taux réduit de 15% ne se pratique qu’à la condition que le capital soit intégralement libéré.
Ainsi, un capital de 100 euros peut suffire.
Mais il existe également une autre raison. À vrai dire, l’argent apporté dans le capital de la société ne peut revenir vers les associés seulement à travers une distribution de dividendes ou une réduction du capital. De toute façon dans les 2 situations ces transferts d’argent sont taxables la plupart du temps par la Flat Tax de 30%.
Au contraire, l’argent apporté en compte courant par les associés peut leur revenir sans aucune taxation.
TVA et sociétés civiles immobilières
La TVA demeure un impôt indépendant à l’impôt sur le revenu ou l’impôt sur les sociétés. Ainsi, la TVA reste souvent une option réservée aux associés de la SCI, et notamment lors d’acquisition de biens immobiliers professionnels. Cependant, l’option à la TVA peut être interdite lors de l’achat d’habitation pour des particuliers ou au contraire obligatoire pour l’acquisition de parkings.
Conclusion : opacité ou transparence fiscale ?
Pour conclure sur cet article, aucun exemple chiffré ne peut affirmer que la SCI à l’IR soit mieux ou moins bien qu’une SCI à l’IS. Finalement, le choix repose plus sur une philosophie de vie et de votre projet.
Ainsi, arbitrer entre une SCI soumise à l’IR ou à l’IS peut se faire lors de la création ou au cours des premières années.
Certaines personnes adeptes de l’adage Un « tiens » vaut mieux que deux « tu l’auras » pourraient préférer l’IS. Au contraire, ceux misant sur la cession, n’étant pas trop imposés et pensant à l’immuabilité des lois préfèreront la SCI à l’impôt sur le revenu.